En dépit de la politique de l’import-substitution en vogue au Cameroun, l’approvisionnement de cette denrée reste adossé aux importations. Ceci, au détriment de la production locale.
La randonnée dans les marchés de Yaoundé, laisse transparaitre la vie chère. Des denrées de première nécessité telles que le riz sont inaccessibles pour la plupart des Camerounais. Actuellement, le prix du sac du riz de 25 kg oscille entre 13 500 FCFA à 18 000 FCFA, en fonction de la qualité. Selon les commerçants du marché de Mvog-Atangana Mbala (Yaoundé IV) cet état de choses est la conséquence des importations. «Il y a le coût du transport impacté par l’augmentation du prix du litre du carburant et des crises exogènes; sans oublier le fait que certains responsables du ministère du Commerce (Mincommerce) rançonnent les importateurs. Ce sont tous ces facteurs réunis qui conduisent à la cherté du riz au niveau des petits commerçants», fulmine un commerçant qui a requis l’anonymat.
Selon notre interlocuteur, le Cameroun n’importe plus le riz de bonne qualité, contrairement aux pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), à l’instar du Gabon et la Guinée Équatoriale. Le Cameroun importe le riz en fonction de la bourse des consommateurs. Si l’on importe du bon riz, les Camerounais ne seront pas en mesure de l’acheter, apprend-on». Le riz brisure qui se fait rare est onéreux. Le sac de 25 kg coûte 18 500 FCFA, parce qu’il est contrôlé. Par contre, le Cameroun gagnerait à échanger avec les pays de la sous-région sus-évoqués, parce que les tarifs de douanes imposés quant à l’importation du riz de bonne qualité sont faibles» explique-t-il. Curieusement, le transport du riz des pays voisins pour le Cameroun est intercepté à Bitam (Gabon), Ambam et Ebolowa. C’est le même constat fait par Anne-Marie, commerçante au marché Acacia (arrondissement de Yaoundé VI). Le marché camerounais est inondé de la contrefaçon. Selon elle, pour l’opération de la lutte contre la vie chère, le Mincommerce Luc Magloire Atangana devrait commencer en amont chez les grands opérateurs et non de venir nous exiger un prix de manière unilatérale alors qu’«on ne s’en sort pas. On ne fait pas le marché pour perdre. On ne peut pas acheter un sac de riz de 50 kg à 27 500 FCFA et on nous exige de le détailler à 535 FCFA le kg», lâche celle qui dit subir des injustices subies depuis 15 ans. Au rang de celles-ci, il y a des pratiques peu recommandables que déplore un commerçant. «Le marché est devenu une jungle. Nous, commerçants, subissons des tracasseries. Lorsque les contrôleurs arrivent, il faut donner leur enveloppe de 5 000 FCFA, voire 10 000 FCFA, pour éviter la scellée. On va se plaindre chez qui?», s’indigne – t-il, visiblement très déçu du système mis en place.
Riz local
Tout ceci laisse voir une insuffisance dans la filière riz. Le Cameroun peine à s’arrimer à sa politique de l’import-substitution. Les importations de riz sont importantes. Tandis que le riz local de Ndop dans le Nord-Ouest (Bamenda), le Sud-Ouest (Buea), et celui de Yagoua dans l’Extrême-Nord, pourtant apprécié par les consommateurs, se fait rare. La production est faible. «La riziculture depuis des lustres est artisanale, sans oublier les conflits qui impactent la production», précise Henriette, vendeuse au marché Acacia. Le riz local arrive à notre niveau après quatre ou cinq mois. Et il est plus cher que le riz importé. «Le sac de 25 kg de riz local coûte 17 000 FCFA, et il arrive en compte goute, puisque l’accès n’est pas facile, et les cultivateurs le font dans la clandestinité, pour la plupart», explique Richard, rencontré au marché Mvog-Atangana Mbala. Et pour renverser la tendance, «les autorités doivent ramener la paix dans les localités en conflits et mécaniser le secteur pour une grande production pour satisfaire la demande locale de plus en plus croissante», suggère-t-il.
Olivier Mbessité
