Tout le monde sait que les aliments sont infestés de poison. Personne n’ose en parler.

« Jambon Serrano STG 10 mois d’affinage minimum six tranches 100g ». De quoi parle-t-on ? Pour apporter des éléments de réponse à cette question, la démarche consiste à se référer à une correspondance du ministère de l’Élevage, des Pêches et des Industries animales, du 4 octobre dernier. Selon le document, ledit jambon, distribué au Cameroun par la société Sodicam et vendu dans les supermarchés Casino, serait contaminé par Listeria Monocytogenes, une bactérie responsable de la listériose (une nfection d’origine alimentaire causée par la bactérie Listeria monocytogenes, à en croire des spécialistes). Dans une correspondance adressée au délégués régionaux du Minepia, le « Jambon Serrano STG 10 mois d’affinage minimum six tranches 100g » a été retiré du marché, après « informations » de la société Casino elle-même.
Omerta
Si les faits sont clairement affichés, les fraudes alimentaires dans les marchés camerounais sont, la plupart du temps, réprimées par un interdit très fort qui les fait passer sous silence. « Le sujet reste tabou», s’emporte Xavier Mbeunoun, défenseur des droits des consommateurs. « Nous avons au mieux uniquement accès à des informations très générales sur les conclusions de certaines enquêtes menées par le ministère du Commerce ou par l’Agence nationale des normes et de la qualité. Mais le nom des marques concernées par des fraudes, celui des produits, des fabricants, les quantités et les lieux de vente par exemple, sont la plupart du temps tenus secrets », explique-t-il.
Pour sa part, Dr Faustine Nadège Ngo Honla égrène quelques scandales alimentaires autour desquels les tabous restent massifs dans les marchés. « On ne sait pas, par exemple ce qu’il en est des multiples échos des viandes avariées injectées d’additifs dangereux pour leur donner l’air d’être frais ; pareil pour les huiles, fruits et légumes dans lesquels on retrouve des produits cancérigènes. C’est le cas avec certaines huiles végétales devenues soudain de l’huile d’olive, beaucoup plus chère, grâce à un ajout de chlorophylle ; des œufs contaminés au fipronil, un insecticide dont l’usage sur les animaux destinés à la consommation humaine est pourtant proscrit ; ces tonnes de cuisses de poulet d’origine européenne hautement polluées à la dioxyne. Nous ne saurons oublier les produits faussement bio, ceux qui s’arrogent une appellation d’origine protégée, sans pouvoir y prétendre, mais lourdement édulcorés chimiquement », brandit la nutritionniste. Elle cite le cas survenu en fin aout 2024 à Ngola-Mbele (région de l’Est). Six personnes (dont des enfants âgés de 8 à 12 ans) y avaient perdu la vie après avoir consommé du couscous de maïs. Le couscous contenait des produits toxiques destinés à éliminer les écureuils et autres animaux dans les plantations.
Que dit la loi ?
Pour y répondre, Maître Mbiam Mgwa, avaocat au barreau du Cameroun, cite l’article 258 du Code pénal cameroun. « Il porte sur l’altération de denrées alimentaires. Celui qui est reconnu coupable de cette infraction est puni d’un emprisonnement de trois mois à trois ans et d’une amende de 5.000 à 500.000 francs ; celui qui, soit falsifie des denrées servant à l’alimentation de l’homme ou des animaux, des boissons ou des substances médicamenteuses, destinées à être vendues, soit détient des produits destinés ou uniquement propres à effectuer cette falsification. Dans un autre alinéa, le même article dit que « est puni de la même peine celui qui détient pour les vendre ces denrées, boissons ou médicaments, soit falsifiés, soit altérés, soit nuisibles à la santé humaine. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux fruits et légumes frais fermentés ou corrompus. Les denrées, boissons et médicaments, s’ils appartiennent encore au coupable, sont confisqués. S’ils ne sont pas utilisés par l’administration, leur destruction se fait aux frais du condamné ».
Bobo Ousmanou
