Dr Omar Farouk Ibrahim «Nous Africains, devons élaborer notre propre agendaet exploiter nos ressources énergétiques»

Le secrétaire général de l’Appo fait le tour des questions brûlantes autour du pétrole africain.

Au vu de l’actualité internationale autour du pétrole et du gaz, doit-on craindre que l’or noir africain ne broie du noir?
Je parlerai en termes de conséquences. Pour les pays africains qui ont la chance de disposer de ressources pétrolières et gazières, les conséquences de ce qui se passe sur le plan international sont que, tôt ou tard, nous risquons de perdre ces ressources. Non pas parce qu’elles disparaîtront de nos terres ou de nos mers, mais parce que la technologie pour les exploiter ne nous sera plus accessible, car ceux dont nous dépendons depuis des siècles pour l’exploitation ont décidé de s’éloigner des combustibles fossiles. L’Afrique ne peut pas permettre que plus de 120 milliards de barils de réserves prouvées de pétrole et plus de 650 trillions de SCUF de gaz soient gaspillés, car ceux dont nous dépendons pour la technologie d’exploitation de ces ressources ont décidé de les abandonner. Pour que nous puissions continuer à bénéficier de ces ressources offertes par Dieu, nous n’avons d’autre choix que de maîtriser rapidement la technologie de l’industrie. Et c’est pourquoi j’ai commencé par dire que cette table ronde est opportune. Notre position est que l’Afrique compte le plus grand nombre de personnes vivant dans la pauvreté énergétique. Pourtant, nous exportons une grande quantité d’énergie, sous forme de pétrole et de gaz, vers des pays considérés comme riches, qui utilisent ces mêmes ressources pour industrialiser leurs nations et améliorer la vie de leurs citoyens. Pourquoi nous refuse-t-on l’opportunité d’utiliser ces ressources pour notre propre développement ? Nous Africains, devons élaborer notre propre agenda et exploiter nos ressources énergétiques sans forcément suivre les directives des pays comme les pays industrialisés qui prônent le net zéro d’ici 2050.

A ce jour, quel visage présente cette ambition d’industrialiser le secteur du pétrole en Afrique?
Pour de nombreux ressortissants de pays producteurs de pétrole et de gaz, en particulier pour les milieux d’affaires, le contenu local commence et se termine par des législations qui favorisent les nationaux dans l’achat de biens et de services. Nous assistons donc à l’émergence de nombreuses sociétés locales de services pétroliers et gaziers dont l’objectif principal est de fournir des biens et parfois des services à l’industrie. Pour les gouvernements, les législations sur le contenu local visent également à fournir des emplois à leurs ressortissants. Ce sont de bons objectifs et il faut les encourager. Mais pour la survie à long terme de l’industrie sur le continent, la stratégie de contenu local doit se concentrer davantage sur la maîtrise de la technologie de l’industrie, en amont, en aval et en milieu de chaîne. Nous devons nous concentrer sur la recherche et le développement pétroliers et gaziers. Nous devons nous concentrer sur l’innovation et la fabrication d’outils et d’équipements pour l’industrie pétrolière et gazière. Nous devons nous concentrer sur la formation de haut niveau des professionnels clés de l’industrie. Une étude majeure menée par l’APPO a établi que même si certains pays africains producteurs de pétrole et de gaz ont fait des progrès dans la maîtrise de l’industrie, aucun pays ne peut prétendre maîtriser tous les secteurs de l’industrie. Tous dépendent encore fortement de sources non africaines, des compagnies pétrolières internationales aux sociétés de services. L’étude a également montré que l’Afrique a tout ce qu’il faut pour maîtriser la technologie de l’industrie si les pays africains mettent en commun leurs ressources pour le bien commun de tous. C’est cette conviction qui a motivé la décision de l’APPO d’œuvrer à la création de centres régionaux d’excellence dans la recherche, le développement et l’innovation dans le domaine du pétrole et du gaz. À l’APPO, nous pensons que la solution au contenu local dans nos pays membres réside dans une plus grande collaboration, en particulier dans les domaines de la technologie et de la finance.

On vous a entendu parler de la Banque africaine de l’énergie. A quel niveau se situe le projet?
Actuellement, les pays sont en phase de décision concernant le dépôt pour la Banque. Selon le calendrier fixé par les autorités, la date butoir pour le début des activités était prévue pour le 30 juin 2024. Mais, nous avons dû faire face à quelques obstacles. Nous avions besoin de 5 milliards de dollars pour démarrer. Mais nous avons décidé qu’il nous fallait 500 millions pour démarrer. Et nous avons obtenu 50% de cette somme avant même d’avoir officiellement lancé la banque. Nous sommes donc convaincus que d’ici la fin du premier trimestre de l’année prochaine, la banque devrait être opérationnelle; Donc, la Banque devrait démarrer à cette échéance. Mais avant cela, nous travaillions également sur les documents officiels, les aspects légaux, etc. En dehors de cela, nous avons déjà commencé à recevoir des contributions financières de nos pays membres pour la Banque d’énergie africaine. Une fois la banque opérationnelle, nous ouvrirons nos portes aux investisseurs hors d’Afrique, y compris du Moyen-Orient. Nous sommes confiants dans les ressources que nous commençons à rassembler et dans l’intérêt que de nombreux investisseurs portent à notre banque. Je peux vous dire fièrement que, dans l’histoire des banques de développement, cette banque est celle qui a pu facilement passer de la conception à la mise en œuvre. En moins de deux ans, nous avons été capables de finaliser tous les documents d’établissement, la charte de la Banque. Nous avons obtenu la signature et la ratification, par un de nos Etats membres, de la convention d’établissement de l’APPO. Nous avons juste besoin d’un autre Etat pour que l’accord soit effectif

Lors de votre intervention, vous avez souligné l’importance de la coopération et de l’intégration pétrolière en Afrique. Sur quels aspects pensez-vous que cette harmonisation devrait se concentrer ?
Il y a principalement trois domaines. Premièrement, aucun pays africain, pris individuellement, ne dispose des fonds nécessaires pour mener à bien des projets énergétiques d’envergure. Cependant, en unissant nos forces au niveau sous régional et régional, et en mutualisant nos ressources, nous aurons largement de quoi financer des projets adaptés à nos besoins. C’est important de considérer les choses de cette façon et par la suite, nous verrons qu’il n’y a aucun intérêt à se tourner vers les partenaires occidentaux pour investir dans nos énergies fossiles. Deuxièmement, en matière de recherche et de technologie, chaque pays dispose d’institutions de recherche dans les domaines du pétrole, du gaz et des mines, mais aucun n’atteint l’excellence, faute de moyens financiers. Nous pourrions donc envisager de créer des centres régionaux de recherche pour atteindre cet objectif d’excellence. Enfin, concernant les marchés. Aujourd’hui, 75% du pétrole et 45% du gaz que nous produisons est exporté. Certains justifient cela par le fait que c’est parce que nous n’avons pas de marchés en Afrique. Ce n’est pas vrai. Il est essentiel de créer un marché de l’énergie en Afrique. Une fois que ce marché sera créé et bien structuré, vous verrez que ces volumes d’Énergie que nous exportons ne sont pas suffisants pour le marché africain.

Propos recueillis par Jean René Meva’a Amougou

46ème Session Ordinaire du Conseil des Ministres de l’APPO : 1er Novembre 2024, Yaoundé, République du Cameroun

Communiqué Final

Le Conseil des Ministres de l’Organisation des Producteurs de Pétrole Africains (APPO) a tenu sa 46ème Session Ordinaire le 1er novembre 2024 à Yaoundé, République du Cameroun sous le Haut Patronage de Son Excellence Paul Biya, Président de la République. Dans son message d’ouverture délivré par le Premier ministre Son Excellence Joseph Dion Ngute, le Président Biya a exprimé sa satisfaction quant aux progrès accomplis par l’APPO depuis sa fondation il y a environ 37 ans. Il a assuré qu’en tant que membre fondateur de l’APPO, le Cameroun continuera à soutenir l’Organisation.

La Session du Conseil qui a été présidée par S.E.M. Bruno Jean Richard Itoua, Ministre des Hydrocarbures de la République du Congo et Vice-Président de l’APPO, avait pour participants les Ministres et les Chefs de délégation de 16 Pays Membres de l’Organisation ainsi que le Secrétaire Général de l’APPO et Directeur Général de la Société Africaine d’Investissement dans l’Énergie, AEICorp.

Le Conseil a réaffirmé la détermination de ses Pays Membres à s’engager pour le succès de la Banque Africaine de l’Energie, dans sa quête de financements pour l’industrie de l’énergie et le développement des infrastructures énergétiques dans les différentes régions du continent en vue de la sécurité énergétique et le développement durable. Le Conseil s’est déclaré satisfait de l’avancement des travaux relatifs à la mise en place de la Banque, et a noté qu’avec la signature et la ratification de l’Accord d’Établissement et de la Charte de la Banque par deux pays, à savoir la République du Ghana et la République Fédérale du Nigeria, le Traité portant création de la Banque est effectivement entré en vigueur.

La réunion a appelé tous les Pays Membres de l’APPO à assurer leur souscription et un paiement rapide de leurs parts allouées dans l’AEB. Il convient de rappeler que le Conseil des Ministres de l’APPO avait accordé en juillet au Nigeria le droit d’accueillir la Banque Africaine de l’énergie.
Le Conseil a approuvé les rapports de l’audit externe des états financiers du Secrétariat pour l’exercice 2023 ainsi que le programme de travail du Secrétariat pour 2025.

Le Conseil a élu le Ministre des Hydrocarbures de la République du Congo, S.E.M. Bruno Jean Richard ITOUA et le Ministre des Mines, du Pétrole et de l’Energie de la République de Côte d’Ivoire S.E.M. Mamadou SANGAFOWA-COULIBALY respectivement Président et Vice-Président de l’APPO pour l’année 2025,
Le Conseil a nommé M. Essé Kouamé Bienvenu, membre du Conseil Exécutif de la République de Côte d’Ivoire et M. Moatez Atef, membre du Conseil Exécutif de la République Arabe d’Égypte, respectivement Président et Vice-président du Conseil Exécutif pour 2025.

Le Conseil a exprimé sa gratitude à S.E.M. Paul Biya, Président de la République du Cameroun et au bon peuple camerounais pour l’hospitalité accordée aux délégations à la Conférence.

La prochaine session ordinaire du Conseil des Ministres se tiendra au Congo au cours du dernier trimestre de 2025.

Yaoundé, le 1er novembre 2024.

Le Vice-Président de l’APPO.
SE Bruno Jean Richard Itoua

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

WP Radio
WP Radio
OFFLINE LIVE
Retour en haut